Fabrice Luchini. Photo Bernard Richebé
Et si Florian Zeller était, en définitive, un auteur de comédie de boulevard ? On peut le penser -sans mépris du genre- à la vue, et la lecture- de sa dernière pièce (1), machine à faire rire, construite sur le thème de l’empêchement, et qui accumule les situations à rebondissements. Voyez donc : un homme a enfin mis la main sur un enregistrement rarissime qu’il recherchait depuis des années. Il rentre chez lui, excité et impatient de l’écouter. Mais tous, et tout, autour de lui va se mettre en travers de son désir, lequel devient, au fil des entraves, de plus en plus obsessionnel. Zeller met en parallèle cette aspiration égoïste et enfantine et les événements, plus ou moins graves, de la vie. Dans cette montée du délire, avant d’arriver au chaos final, les ressorts comiques utilisés sont classiques : le défilé de fâcheux, le plombier (et l’inévitable fuite d’eau),… La mécanique est parfaitement réglée, même tournant à vide, les personnages, sans réelle épaisseur, s’agitant alors comme des électrons. Car l’auteur, habile dans l’écriture, ne révèle aucune empathie, ni considération pour ses personnages. Si son héros ne cherche pas à attirer la sympathie, il aurait gagné à avoir davantage d’épaisseur, laisser deviner quelques failles. Mais… il est interprété par Fabrice Luchini, qui en fait un véritable caractère. Formidablement à l’aise dans ce registre, le talentueux comédien, d’une efficacité sans faille, d’une vivacité et d’une fluidité remarquables, excelle, déclinant tous les stades de l’énervement et de la stupéfaction, réelle ou feinte, et la qualité de son élocution ne laisse rien perdre des multiples agacements et passages à vide de son personnage. Son énergie, sa virtuosité relèvent du grand art de la comédie. Dans la mise en scène dynamique de Ladislas Chollat, ses partenaires, au premier rang desquels Christiane Millet, fine et juste, suivent le rythme sans faillir. C’est dire !
(1) texte paru à L’Avant-Scène théâtre.
Une heure de tranquillité * *
Théâtre Antoine, 14 bd de Strasbourg, Paris 10e. Location 01 42 08 77 71. www.theatre-antoine.com Jusqu’au 4 mai. Reprise à partir du 17 octobre.
